Le fleuve Solaar


Une heure avec Solaar (et deux minutes en rab). Après dix ans de silence. Claude MC collectionne les standards depuis ses premiers raps, en 1990 : Bouge de là, La Concubine de l’hémoglobine, Qui sème le vent récolte le tempo, Caroline, Nouveau western, Victime de la mode, Les temps changent, Solaar pleure… Assez pour nourrir sa légende. Avec ce huitième album, le poète qui ne s'émousse pas vient d'ajouter un carré d'as au fil d’une œuvre mastodontesque: Les Mirabelles, où Solaar anthropomorphise un village de la Marne en 1914; J.A.Z.Z., avec la chanteuse Maureen Angot dont la voix colle, oui, comme un « gum-chewi »; l’irradiant Aiwa, tube de « crème Solaar » aux courbes élyséennes (d’où l’emploi de l’adjectif « anacréontique » - une première dans la chanson française ?- pour suggérer le spectacle érotique qu’offrent les beach volleyeuses sur le sable blond de Rio); et Géopoétique, divagation royale rappellant ô combien Solaar demeure le king de la rime et de l’image inattendue (« On dit qu’en Colombie / Les hiboux deviennent chouettes dès lors qu’ils croisent une colombe bi »). Les ânes trouveront à redire.

Baptiste Vignol