Pour l'amour d'elle


Quelques mois après le formidable hommage d'un ogre à son amie (GÉRARD DEPARDIEU CHANTE BARBARA), ce sont maintenant treize femmes qui, vingt ans après son envol, saluent (sous la direction musicale de l'immense Édith Fambuena) celle qui symbolise la chanson féminine à son zénith. Zazie, jolie surprise, ouvre donc le bal, pertinente et rageuse (voilà ce qu'on attend d'elle), en reprenant La solitude. Viennent ensuite Jeanne Cherhal, émouvante, juste et délicate dans sa version de Nantes, Julie Fuchs qui, de sa voix céleste, sublime Gottingen et Dani, la fatale («Qu'on m'amène ce jeune homme…»), inattendue mais parfaite dans le cadre ombrageux de ce bijou instantané que demeure l'épatante Si la photo est bonne. Une entame exemplaire qu'Angélique Kidjo, aussi scintillante qu'une étoile, africanise en s'attaquant au nervalien Soleil noir! Brillant. Si Nolwenn Leroy (Dis, quand reviendras-tu?) chante comme chantent celles qui gagnent des télés-crochet, la voix farcie de chantilly, Louane, à sa manière, unique, presque détachée, s'approprie Mon enfance, allumant même ici des feux insoupçonnés. Quant à l'actrice Virginie Ledoyen, elle fait plus qu'étonner avec Cet enfant-là, elle émerveille. Mais alors, pense-t-on, qui donc a pu se risquer à chanter L'Aigle noir, l'autre chef-d'œuvre tragique, avec Nantes, de la Longue dame brune? L'aiglon Juliette Armanet. Il existe des standards vertigineux dans lesquels il vaut mieux ne pas trop se lancer quand on n'est pas (encore) un as de la voltige... Et l'on regrette ici les absences de Catherine Ringer et de la Grande Sophie. Par-delà trois ou quatre trous d'air, voilà donc le tribut, le gage d'admiration, d'amour à Barbara qu'il faut se procurer. Tout autre, s'il s'en trouve, paraitra bien pâlot.

Baptiste Vignol