Entre Murat et Muray


Pour son cinquième disque, le chanteur Bertrand Louis, qui était jusqu'ici son propre auteur-compositeur, s'est trouvé avec Philippe Muray (1945-2006) un parolier sur-mesure. La douzaine de poèmes extraits du recueil «Minimum respect» paru en 2003 épousent avec cohérence l'univers houellebéquien qu'explore le chanteur depuis 2001 et son minitube À trente ansÀ trente ans / Laisse-moi te décrire toi qui te parisianises / À trente ans / Comme la vie te matérialise / Appartement...»). Est-ce parce que cette appropriation musicale plaide avec élégance en faveur de la langue française que l'album SANS MOI (SUR DES TEXTES DE PHILIPPE MURAY) recueille autant de satisfecit? L'heure est venue pour Bertrand Louis de le défendre en public. «Entre tes seins et le lointain / On entendait chanter un psaume / Essor d'oiseaux, nuage carmin / Je me souviens de ce royaume...» (L'existence de Dieu). Assis à son piano qu'il traite avec vélocité, formidablement accompagné par un guitariste, Jérôme Castel, dont le visage, malgré la barbe et les lunettes, rappelle le Jean Marais des «Fantômas», Bertrand Louis délivre avec zèle et d'une haleine bouillante un chant qui semblait sommeiller dans son cœur. Impressionnant.

Baptiste Vignol