Un magnum. D'eau tiède?



Il s'appelait Katerine, et sa sœur, Bruno. De 1991 au milieu des années 2000, il sortit quelques disques étonnants, juteux comme des tomates, farcis de chansons délicates, loufoques et poétiques. Mon bel Andalou, Un après-midi à Paris, Mon cœur balance, Copenhague, Je vous emmerde... De quoi devenir peut-être un nouveau Charles Trenet. D'ailleurs, en novembre 1999, il était là, salle Pleyel, pour applaudir le Fou chantant. Tendre l'oreille, et l'entendre au bar, à l'entracte, parmi la foule des spectateurs, expliquer un verre à la main à l'inoubliable Helena Noguerra son admiration pour Trenet... C'était bien. Et puis boum. Après ROBOTS APRÈS TOUT (2005), propulsé par Louxor J'adore et son inusable gimmick «Et je coupe le son...», Katerine n'a cessé de s'égarer en collaborations ratées (Arielle Dombasle, 2007; Les Vedettes, 2008), en chansons douteuses (La banane, etc., 2010), au nom d'une pataphysique à la gomme. Huit ans déjà. C'est long. Pourtant, malgré la formidable déception que ces disques suscitaient, ils continuaient d'être encensés dans la presse parisienne par quelques apôtres qui virent probablement là l'occasion de prendre une pose «décalée» - l'adjectif passe-partout. Le grand public, qui achète ses disques, ne réagit jamais à la petit patapon. Las, il s'en est vite allé voir ailleurs écouter Stromae. En fait, il ne faut pas jouer au fou, c'est le signe d'un manque de génie, et les gens ne vous le pardonnent pas. On continuait néanmoins d'espérer le disque qui lui permettrait de gagner sa place au sommet, pas loin des Souchon, Trenet et Nino Ferrer. Son prochain, MAGNUM, fut annoncé pour le mois d'octobre 2013. Impatience. Hélas, les deux extraits (Sexy Cool, Effeminé) qui, en une quinzaine de jours, viennent d'être dévoilés sur la toile ont fini de décevoir. Ni drôles ni «déjantés», ils ne sauraient être en tout cas le quelconque reflet d'une nullité ambiante, comme certains critiques l'expliqueront. Puisqu'on en est à les comparer, Sébastien Patoche amuse davantage. «Le déjà culte "Sexy Cool"» lit-on sur le Net... Sur quelle planète vivent-ils, les mecs des Inrocks? Ils se paluchent entre eux avec Katerine dans son salon ou quoi? Quant au navrant EfféminéAvec mes grosses couilles / Je vais à Casino / Avec mes grosses couilles / J'achète mon Kinder Bueno...»), Le Figaro y voit une «pépite à la lisière du disco». Qu'y a-t-il à gagner à les lui lécher de la sorte? Sa sympathie? Ils en seraient donc là... À moins que tout ça ne soit que grosse fumisterie, une escroquerie artistique en bande organisée. Ce serait fort.

Baptiste Vignol