D'une artiste à son éditeur










Salut Maxou, 

tu vas sacrément nous manquer... 
Toi et ta grande gueule, ton paquet de Gitanes à portée de main sur le bureau (TON bureau... Ton épicentre...), ton amour sans limites... de la vie, de la musique, du pinard, des bonnes bouffes, des beaux mots, des textes, du Métier... (avec un grand M comme "Mort aux cons" parfois), ta mauvaise foi légendaire (qui assortie à la notre faisait parfois d'intrépides remous), tes répliques et ta dégaine de vieux briscard à la Gabin, tes accès soudains de vulgarité qui nous laissaient sans voix, mais nous faisaient bien rigoler, nos prises de tête, nos émotions artistiques partagées, la troisième bouteille de vin commandée à la fin du repas et qui nous déversait, nous les "jeunôts", total groggy sur le trottoir à 4 heures de l'après midi (tandis que toi, tu repartais, allègre et – presque - frais comme un bouton de rose), et puis, ces premières écoutes, attendues, des nouveaux morceaux, toi... sérieux et papal sur ton fauteuil en cuir qui tourne, et nous, fébriles, anxieux parce que ton avis, ça compte (et pas seulement parce que tu étais notre éditeur, ou notre producteur), voilà, merde, fais chier, même ta misogynie elle va me manquer, c'est dire ! Et puis tes "artistes", ceux que tu suivais, depuis longtemps, c'était un peu tes "enfants" (c'est toi qui l'a dit !), alors oui, je me sens un peu orpheline aujourd'hui. 
Tu étais unique, entier, généreux et râleur, et c'est comme ça qu'on t'aimait… Tu n'as pas toujours été tendre avec moi, tu m'as malmenée parfois (enfin verbalement s'entend ! et puis je ne me laissais pas faire non plus hein!), il y avait aussi et surtout beaucoup d'amour dans tout ça... et c'est ça qui compte. 
Le paysage musical français et l'évolution du disque comme on dit, te faisaient chier mais tu n'étais pas aigri, toujours à prêt à t'emballer et la tête pleine de nouveaux projets.

Il y a quelques semaines, tu avais tout vendu et c'était déjà ta petite mort. Je ne te voyais pas à la retraite, Max, cultivant d'improbables tomates dans un bout de jardin ensoleillé, ta vie c'était ton métier et ton métier ta vie, il n'y avait pas de différence...

 Allez, salut Max, je crois que je continuerai à te soumettre nos chansons à Jean-Jacques et moi quand on les aura terminées, et, où que tu sois, j'espère que tu nous donneras ton avis (et tu as intérêt à aimer, sinon, fais gaffe, ça va chier !) 

Et puis... sache que tu seras toujours là, quelque part à la sortie de scène, derrière un bout de rideau en velours, à me faire les gros yeux pour m'empêcher de retourner faire un deuxième ou troisième rappel (parce que le public, il "faut le laisser sur sa faim, bordel de merde !"), et moi j'y retournerai quand même, 
mais je sais que tu ne m'en voudras pas.

Clarika

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